mercredi 16 novembre 2016

Rosalie Lamour de Frédéric Tournoux




Biographie:
Frédéric Tournoux, professeur de lettres, signe ici un nouveau roman, après Aveugle, Mademoiselle Rachel, son livre consacré à la grande tragédienne du XIXe siècle, et L'Aiglon. Il rencontre dans les années quatre-vingt le poète Philippe Soupault qui l'encourage à écrire. De 2002 à 2005, il anime un atelier d'écriture pour les détenus de la maison d'arrêt de La Santé à Paris.


 Rosalie Lamour-Une femme sous l'Occupation.

Résumé :

1936, le Front populaire. Puis l'Occupation, l'après-guerre. Nous suivons Rosalie de son adolescence à l'âge adulte, partageons ses amours, ses déchirements, son sort cruel de femme tondue à la Libération et enfin sa renaissance avec le cirque Bouglione. Le récit offre aux lecteurs, comme le rappelle Jean Tulard, de redécouvrir les merveilleux films de Marcel Carné (Le Jour se lève, Les Visiteurs du soir et Les Enfants du paradis). Rosalie Lamour est une jeune femme sensible, émouvante et belle, d'une beauté intérieure qui irradie dans tout son être.



Ce que j'en pense : 


 Frédéric Tournoux nous offre avec ce roman une très belle et émouvante histoire, celle d’une femme jeune et belle avec ses doutes  mais aussi ses espoirs en cette vie qui ne lui a pas fait de cadeau . Elle se prénomme Rosalie. Rosalie Lamour.  L'histoire de sa naissance détermine ses postures dans un monde en pleine mutation.

Esquisse délicate d’un personnage malmené par la vie qui croisera le chemin de trois hommes. Ces rencontres seront déterminantes dans sa vie de femme.

Trois rencontres, trois époques marquées par l’empreinte cinématographique de Marcel Carné et les mots de Jacques Prévert. "Les gens qui s'aiment sont plus vivants que les autres"...

Pour faire le portrait de Rosalie, il faut d’abord un décor celui des enfants du Paradis ou  celui de l’Hôtel du Nord. Il est question d’atmosphère dans ce roman, quelques passages sur la beauté de Paris, même en temps de guerre, sont salutaires car le lecteur est rapidement happé par le destin de cette fleur fragile. L’ambiance serait celle du Front Populaire puis de l’occupation avec ses privations et ses délations...Enfin, arrive la résurrection de l’après-guerre.

La résurrection aura lieu dans un univers qui fait rire les enfants et redonner des étoiles dans le regard des plus grands…Le cirque Bouglione, où Rosalie deviendra Mademoiselle Rosa et retrouvera foi en l’Humanité dans les bras de Maurice.

Tout au long de ces 137 pages, avec infiniment de tact et de pudeur, Frédéric Tournoux nous décrit le quotidien de cette femme sous l’Occupation, et pour paraphraser le poète de celle que l’on pouvait maltraiter à défaut de châtier les vrais coupables.
Un  très beau roman à découvrir, à lire et relire.

Bande son 

Yvonne Printemps Quand le printemps vient/ Wenn es Frühling wird" (1941)

crédit photo Eric Martini tous droits réservés.

L'interview de l'auteur

Comment vous est venue l'idée de ce livre?
J'avais lu, il y a deux ans, dans le journal "Le Monde", le témoignage d'un fils qui évoquait la vie de labeur de sa mère, modeste femme de ménage dans la France de l'après-guerre. J'avais envie de traiter un thème social et j'ai commencé à faire des recherches sur cette période à la bibliothèque historique de la ville de Paris. Et puis, je suis remonté un peu plus loin, au temps de l'Occupation, même jusqu'au Front populaire. C'est ainsi que l'on suit mon personnage Rosalie de 1936 jusqu'en 1948.

Rosalie a-t-elle existé?
Rosalie est un personnage de roman, avec sa vie propre, mais elle représente toutes ces femmes sauvagement tondues à la Libération.
Rosalie connaît trois hommes: Etienne, Hans et enfin Maurice. Que pouvez-vous dire de ces trois personnages? Ne sont-ils pas les maillons d'une seule et même chaîne d'aliénation?
On peut considérer que Etienne et Hans sont misogynes et, en tout cas, se sentent supérieurs à Rosalie. Elle va en souffrir mais, grâce à Maurice, le clown Momo du cirque Bouglione, elle va se libérer et s'épanouir car Maurice aime Rosalie, d'un amour pur et sincère.
Êtes-vous tombé amoureux du personnage de Rosalie?
Question délicate... Le fait que j'ai trouvé par hasard une photo de Lore Krüger, datant de 1937, qui me semblait parfaitement incarner Rosalie, m'a permis de donner un visage à mon héroïne et je suis très sensible à son regard mélancolique, rêveur, si poétique, que l'on peut voir sur la couverture du livre. Alors, oui, je suis amoureux d'elle, mais peut-être encore plus de sa beauté intérieure.
Pourquoi l'accompagner avec bienveillance jusqu'au mot fin?
J'avais envisagé une fin tragique et puis je n'aime guère la pathos. De plus, 20000 femmes ont été tondues à la Libération. Assez d'horreur, de barbarie et de haine. Rosalie découvre l'amour, le vrai, deviendra grand-mère. L'espoir et la vie triomphent. Tant mieux.
Parlez-nous de votre rencontre avec Rosa Bouglione...

C'est une femme extraordinaire, âgée de 105 ans, qui m'a fourni des documents sur le cirque Bouglione que son mari, Joseph Bouglione, dirigea après la guerre. Je l'avais contactée et nous avons eu des échanges qui m'ont permis d'écrire la dernière partie du roman. Je l'en remercie vivement.
Quels sont vos projets d'écriture?
Je viens de commencer un nouveau roman où le personnage principal est là aussi une femme. Elle est condamnée pour meurtre et va vivre une histoire d'amour avec un surveillant. Mais j'ai du mal à "m'extraire" de Rosalie, à l'oublier. Ah, vous voyez bien...Je suis amoureux d'elle !

Rosalie Lamour-Une femme sous l'Occupation
Editions Glyphe
12€

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